100 ways to be a good girl {Billy}

Comme chaque soir avant qu’elle ne quitte le domicile familial pour aller travailler, elle prenait le temps de partager un repas mitonné une bonne partie de l’après-midi avec son fils unique, le seule homme de sa vie à présent. Autrefois, leurs repas étaient bien plus animés qu’aujourd’hui, sûrement grâce à la présence d’Adam qui avait toujours le mot pour rire et trouvait un moyen pour que le silence ne s’installe jamais, il passait son temps à faire des farces et sa femme était sa victime favorite, toujours très bonne cliente parce qu’un rien la contrariait et qu’elle pouvait hurler à la vue d’une malheureuse araignée en plastique. Elle reconnaissait volontiers que c’était pathétique mais elle n’avait jamais rien pu contre sa terrible phobie des insectes et ne pensait pas pouvoir régler ça un jour et de toute façon, elle avait bien trop de soucis à régler sans s’encombrer de problèmes secondaires et de moindre importance. Maintenant qu’elle était de nouveau femme célibataire, elle devait faire face à des problèmes d’organisation, travaillant la nuit, il était vite compliqué de s’occuper de son fils et elle avait fini par déléguer ses responsabilités à une baby sitter qui veillait sur lui toute la nuit et s’en allait au petit matin, laissant Ayana gérer le reste et lui offrant la possibilité de le conduire à l’école tous les matins, même si elle était souvent épuisée et loin d’être d’humeur à se confronter à des gamins en furie et des parents plein de compassion. Heureusement pour elle, Isaiah avait beaucoup grandi depuis la mort de son père adoptif et avait su gérer ça avec bien plus de philosophie que sa mère, comprenant qu’être l’homme de la maison signifiait prendre soin d’elle après toutes ces années où elle s’était battue pour l’élever seule et prendre soin de lui de son mieux. Il y avait des moments où la texane culpabilisait, à cause de son métier qui n’entrait pas dans la norme et ses horaires qui l’empêchaient d’être une bonne mère mais également parce qu’elle avait eu la très mauvaise idée de refaire confiance à un homme, de lui laisser une place importance dans sa vie et celle de son fils pour qu’il les abandonne, comme le père biologique d’Isaiah l’avait fait avant lui et ça, ça lui était insupportable. Elle se sentait comme responsable de la souffrance de son bébé, qui avait tout de même douze ans et quoi qu’il puisse lui dire pour tenter de la réconforter, elle ne parvenait pas à se défaire de cette culpabilité et encore moins depuis qu’elle avait osé franchir la barrière de circonstance entre elle et Corben et que ses lèvres s’étaient déposées sur les siennes. D’ailleurs, depuis cet épisode malheureux, il ne remit pas les pieds chez eux ou du moins pas lorsqu’elle était là, passant chercher son filleul au collège et le déposant pour s’en aller presque aussitôt et pour dire vrai, ça convenait parfaitement à la jeune mère. Comment aurait-elle pu lui faire face après ça ? Le regarder dans les yeux et faire comme si de rien était ? Elle était vraiment la reine des conneries !

« Tu penses te remarier un jour ? »

La question échappa au pré ado qui fixait sa mère avec intensité alors que celle-ci tentait de se remettre du choc et de l’impertinence de ce qu’il venait de lui demander. Si elle comptait se remettre avec quelqu’un ? Sûrement pas, surtout pas après la mort d’Adam et son deuxième échec amoureux, c’était trop pour elle et elle n’était pas sûre d’avoir la force de s’engager dans autre chose, d’avoir la patience de s’occuper d’un autre homme et surtout l’envie d’avoir quelqu’un à ses côtés en craignant sans cesse qu’il disparaisse comme par magie sans qu’elle n’y puisse rien. Mieux valait la solitude à la peine engendrée par une perte. Pourtant, elle était jeune et en pleine possession de ses moyens, les propositions n’étaient pas ce qu’il manquait et si parfois, une montée d’hormones lui faisait accepter de boire un verre, elle ne parvenait jamais à aller plus loin, le souvenir de son époux la hantant et la forçant à l’abstinence, au plus désespoir de Jubilee, sa meilleure amie. Bordel, ce qu’elle aurait aimé être aussi débridée qu’elle et être capable de s’envoyer un type différent par soir, histoire de coller à l’image qu’elle renvoyait à chaque fois qu’elle retirait ses fringues et enflammait la salle entière.

« Non. » répondit-elle simplement en portant une feuille de salade à sa bouche
« Pourquoi ? T’es belle, je trouve ça dommage que tu restes toute seule toute ta vie, c’est pas ce que papa aurait voulu. »
« Je pense que si ton père avait eu à choisir, il serait là avec nous. »
« Mais il est mort maman, va falloir que tu comprennes qu’il ne reviendra pas. Tu sais, je t’entends pleurer parfois et je pense que ce serait bien que tu aies quelqu’un pour prendre soin de toi. »

Ce fut plus fort qu’elle, les larmes lui montèrent aux yeux et elle dut faire un effort considérable pour ne pas les laisser rouler sur ses joues rondes. Avec un faible sourire, Ayana se saisit de la main de son fils et y déposa ses lèvres avant de l’enfermer entre ses paumes et de la serrer. Il avait tellement grandi en si peu de temps, au point où il encaissait bien mieux les choses qu’elle ne le ferait jamais, elle était une femme avec beaucoup de caractère mais terriblement fragile et cette énième perte avait été le coup dur qui avait rouvert toutes les vieilles blessures. Elle se faisait l’effet d’être un véritable boulet pour son propre enfant et c’était un sentiment insupportable, il était grand temps qu’elle se reprenne et qu’elle se montre moins vulnérable, pour lui.

« Tu trouves pas qu’on est bien comme ça, juste toi et moi ? »
« Si, mais t’es pas souvent là et depuis que tu t’es disputé avec Oncle Corben … »
« On ne s’est pas disputés chaton, il a beaucoup de choses à faire, moi aussi, alors on se voit moins. » répliqua-t-elle avec gêne en débarrassant la table précipitamment
« Donc ça te dérangerait pas que j’aille dormir chez lui ce soir ? Il vient me chercher dans une heure. »
« Non, bien sûr que non. Ecoute mon chéri, je te laisse terminer de manger, je vais préparer tes affaires et les miennes pour ce soir. »
« Mon sac est déjà prêt. »
« Oui bien sûr, si tu crois que ton microscope va te tenir chaud. » ironisa-t-elle avant de disparaitre dans la chambre de son petit pour en sortir que lorsque la sonnerie de l’interphone retentit et que sonna l’heure du départ pour Isaiah.

***

C’était l’un de ces soirs de congé qu’elle devait consacrer à la recherche intensive d’un petit ami pour combler les attentes de Jubilee et surtout ne plus l’entendre lui faire la morale à propos du fait de faire son deuil et de se remettre en selle le plus rapidement possible pour ne pas perdre la main. En la matière, on ne pouvait pas vraiment dire qu’Ayana avait beaucoup d’expérience, ses partenaires furent limités et elle n’en gardait pas de très bons souvenirs hormis ce qui concernait son défunt époux, ce qui compliquait sensiblement la tache de la brunette qui tentait désespérément de la faire sortir de sa carapace pour qu’elle ne broie plus du noir et essaie d’envisager sa vie sous un autre angle, bien moins triste et beaucoup plus rock’n’roll. L’amusement, chose qu’elle n’avait pas eu le temps d’approfondir à cause de sa grossesse précoce et des responsabilités qui se greffèrent naturellement à cette situation. Ce soir, son fils passait une énième nuit chez celui qui avait substitué son père, en quelque sorte : Corben. La strip-teaseuse voyait tout ça d’un très mauvais œil mais n’osait pas interdire ces petits rituels à Isaiah parce qu’elle savait que se retrouver entre hommes lui faisait du bien et que s’il y avait quelqu’un à qui elle pouvait confier son fils les yeux fermés, c’était bien au meilleur ami de son mari. Vêtue d’une robe noire plutôt classique qui dévoilait ses longues jambes félines, elle attendait devant un célèbre bar, regardant sa montre toutes les cinq minutes en espérant que Billy ne lui ferait pas faux bond, après tout, c’était dans les clauses de leur contrat. Elle acceptait de se rendre à ces soirées pour célibataires à condition que la brunette soit également de la partie et ne l’abandonne pas à son triste sort. D’ailleurs, la plupart du temps, Jubilee repartait avec un partenaire pour la nuit tandis que pour Aya, les choses étaient beaucoup moins reluisantes. Au fond, elle n’avait pas envie de remplacer Adam et malgré la gentillesse de certains hommes qui venaient l’aborder, elle ne pouvait accepter leur invitation et finissait toujours par les éconduire avec douceur pour finalement atterrir dehors et tenter de reprendre ses esprits mais surtout pour retenir ses larmes. Trois ans seulement après, elle estimait qu’il était trop tôt, la plaie était encore ouverte et ne semblait pas encline à s’estomper pour lui fiche la paix.

« Bordel, j’ai failli finir congelée ! Tu foutais quoi Billy ? » lança-t-elle avec exaspération alors que la jeune femme venait à sa rencontre d’un pas nonchalant